Julian était rentré. Il y a une semaine de cela, il était apparu sur le pas de leur porte et elle s’était effondrée dans ses bras, les larmes ruisselants sur ses joues, submergée par la joie de le revoir. Il était vivant, pour son plus grand soulagement. Qu’aurait-elle fait s’il n’était pas revenu ? Que ferait-elle si un jour il ne revenait pas ? Là résidait toute la question, seulement elle ne préférait pas y penser. Il était rentré et rien n’avait plus d’importance à ses yeux. Seulement depuis qu’il était de retour, ça n’était pas forcément la joie tous les jours à la maison. Ils se disputaient souvent, encore et encore, toujours pour la même chose. Elle voulait qu’il arrête l’armée, qu’il reste avec elle et qu’ils fondent une famille, car elle ne désirait rien de plus que d’avoir un enfant avec l’homme qu’elle aimait. Et lui la traitait d’égoïste, mots qu’elle lui renvoyait puisqu’après tout, il était aussi égoïste qu’elle dans cette histoire. Leur dispute semblait sans fin et sans solution. Ou tout du moins, sans solution acceptable pour l’un ou pour l’autre. Alors ça continuerait, elle le savait. C’est pour cette raison qu’elle évitait de remettre le sujet sur le tapis trop régulièrement, car elle détestait se disputer avec lui, notamment lorsqu’elle ne l’avait pas vu depuis des mois. Ils avaient autre chose à faire que de se prendre la tête, non ? Elle préférait largement profiter de son corps, chose qu’elle avait voulu faire ce matin-là, mais il l’avait poussé du lit en lui disant qu’elle devait aller travailler. Oui, bien évidemment. Mais peut-être que cette fois-ci elle aurait pu faire une petite, toute petite exception. Seulement il s’était montré impassible et elle avait dû rendre les armes. Elle s’était levée en grommelant et en tirant une moue boudeuse. Ce n’est qu’une fois arrivée au travail qu’elle avait oublié tous ses problèmes. Les animaux avaient cet effet-là sur elle, ils étaient comme un remède face à la dureté de la vie. Un remède qui lui faisait du bien.

Vers seize heures elle décida de quitter la clinique. Habituellement elle ne partait jamais aussi tôt du travail, mais cette fois-ci elle avait souhaité faire une surprise à son homme. Elle savait que ça lui ferait plaisir de la voir revenir de si bonne heure. Ou tout du moins elle l’espérait. Elle raccrocha donc sa blouse et attrapa ses affaires et ses clés de voiture, direction : la maison. Mais avant cela elle fit un rapide détour par le supermarché du coin pour acheter une bouteille de leur vin préféré. Ils pourraient la boire ce soir. Après ça, elle regagna son véhicule et roula en direction de chez eux. Une fois devant la maison, elle se gara devant la maison et descendit, son sac sur l’épaule. Lorsqu’elle poussa la porte d’entrée, elle crut tout d’abord que son fiancé était absent, la demeure était étonnamment silencieuse. Puis des voix se firent entendre, provenant de la cuisine, et la jeune femme haussa un sourcil. Qui cela pouvait-il bien être ? Elle retira rapidement sa veste en jeans et ses chaussures et gagna la cuisine, lieu d’où lui parvenaient les voix, sa bouteille à la main. Lorsqu’elle arriva dans l’embrasure de la porte, elle se stoppa net et son sang se glaça. Qui était cette femme lovée dans les bras de son homme ?  – son homme qui était torse nu, soit dit en passant - Cette femme qu’il venait d’embrasser sur le front avec délicatesse ? Elle lui paraissait vaguement familière. Elle resta silencieuse un moment, tentant de se rappeler l’endroit où elle avait bien pu croiser cette jeune femme. Son cerveau marchait à pleine vitesse, cherchant l’information qui pourrait lui permettre de comprendre. Et, soudainement, la pièce manquante du puzzle vint se mettre à sa place et elle lâcha la bouteille qu’elle avait dans les mains. Pendant un court instant, on n’entendit plus que le fracas du verre contre le carrelage de la cuisine et, lorsqu’elle releva la tête, elle remarqua qu’ils le regardaient.

Elle savait où elle l’avait déjà vu. Bien sûr, qu’elle idiote elle faisait. Cette femme, elle l’avait déjà aperçu de loin, à la sortie de l’hôpital, un peu plus tôt dans la semaine. Et déjà à ce moment-là, elle se trouvait avec son fiancé. Sur le moment, Lexie avait trouvé cela étrange, mais elle s’était fait violence pour ne pas s’emballer et pour ne pas que son cerveau se mette à imaginer toutes sortes de scénarios. Mais maintenant qu’elle la retrouvait aussi chez elle, comment devait-elle interpréter les choses ? Surtout vu ce qu’elle avait sous les yeux. La jeune femme était enceinte, cela ne faisait aucun doute. Et pourquoi Julian tenait-il une échographie dans ses mains ? L’évidence s’imposa rapidement à son esprit et des larmes vinrent lui piquer les yeux. Alors c’était ça l’explication ? C’était elle la raison de toutes leurs disputes ? Il ne voulait pas d’enfants avec elle, parce qu’il allait déjà en avoir un avec cette salope ! « Connard… » Elle avait murmuré ses mots, pourtant elle ne doutait pas une seule seconde qu’il les eut entendu. Dégoûtée par cette vision qui lui brûlait la rétine, elle tourna les talons et s’enfuit rapidement vers la porte d’entrée, souhaitant quitter cette maison au plus vite.